Politique

Pourquoi les kits de dépistage en pharmacie contre la soumission chimique sont abandonnés

VIOLENCES SEXUELLES – Les kits de dépistage en pharmacie pour lutter contre la soumission chimique ne seront finalement pas mis en place. Annoncés par Michel Barnier à titre expérimental en novembre, ils ne font pas partie des 50 recommandations pour combler les lacunes dans la prévention et l’accompagnement des victimes.

Remis au gouvernement ce lundi 12 mai, le rapport de la mission parlementaire sur la soumission chimique, fléau notamment mis en lumière par le procès des viols de Mazan, a été mené par la députée MoDem Sandrine Josso, qui en a elle-même été victime en 2023, et par la sénatrice (RDSE) et médecin Véronique Guillotin.

Pour lutter contre ce qui était jusqu’à récemment un angle mort des violences faites aux femmes, l’ex Premier ministre Michel Barnier avait annoncé en novembre l’expérimentation d’un kit de détection remboursé par l’Assurance maladie, afin de constater rapidement toute trace de substances, dès le lendemain d’une agression présumée.

Cette annonce devait concrétiser une demande de Sandrine Josso, détaillée auprès du HuffPost en octobre, qui insistait sur l’importance de rendre cet outil facilement accessible en pharmacie. « C’est le pire ennemi des prédateurs », faisait-elle valoir dans nos colonnes. Ce kit a donc finalement été abandonné dans le rapport parlementaire, faute de moyens techniques pour les rendre assez fiables.

« Ces autotests ne sont pas sérieux »

« Nos travaux ont permis d’écarter cette option, explique la rapporteure Sandrine Josso, dans une interview à Libération. Ces autotests ne sont pas sérieux. Il y a trop de substances pour que ces kits puissent toutes les identifier. Ils risquent de produire des faux négatifs, compromettant les preuves nécessaires devant un tribunal. Seuls des prélèvements réalisés en laboratoires spécialisés peuvent garantir de vrais résultats. »

La mission recommande la mise en place de kits de prélèvements biologiques en laboratoire et la création d’un répertoire référençant les établissements capables de les réaliser, dans chaque région. Elle demande également à ce que ces analyses toxicologiques soient intégralement prises en charge par l’Assurance maladie, même sans dépôt de plainte.

Face à des parcours jugés peu lisibles par les victimes, la mission préconise l’élaboration d’un référentiel de la Haute autorité de santé (HAS) sur le dépistage, l’orientation et l’accompagnement. « Celui-ci intégrera notamment une fiche réflexe et une identification des différents lieux où réaliser des prélèvements biologiques dans les heures qui suivent au regard du maillage territorial », précise le rapport.

« Une véritable politique d’État »

Le rapport, confié aux deux élues en avril 2024 par le gouvernement Attal, réclame une « véritable politique d’État avec les moyens qui vont avec ». Elles émettent une cinquantaine de recommandations, dont 15 à « mettre en œuvre en priorité » dès cette année, allant de la prévention à l’accompagnement des victimes en passant par le traitement judiciaire ou encore la recherche consacrée à ce phénomène.

Elles recommandent notamment le lancement, à un rythme annuel, d’une vaste campagne de sensibilisation à destination de l’ensemble de la population, ainsi qu’« un renforcement des moyens » au bénéfice de l’éducation à la vie affective et sexuelle (Evars) dans les établissements scolaires.

Autres mesures préconisées, l’élargissement de la levée du secret médical aux cas de soumission et de vulnérabilité chimiques ou la généralisation du recueil de preuves sans dépôt de plainte, déjà expérimentée depuis 2023 dans certains hôpitaux dans les cas de violences sexuelles.

Selon les estimations officielles, 1 229 soumissions et vulnérabilités chimiques vraisemblables ont été analysées en 2022 par le centre de référence des agressions facilités par les substances (CRAFS). « Une représentation infinitésimale des situations qui affectent très majoritairement des femmes, à tous les âges de la vie, dans le foyer familial et les différents lieux de rencontres », note le rapport.

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