Politique

Pourquoi l’hypothèse Xavier Bertrand à Matignon fait son chemin en Macronie

POLITIQUE – Une option qui tient la corde? En trois jours, trois membres du gouvernement démissionnaires ont été interrogés dans les médias sur l’hypothèse Xavier Bertrand à Matignon. Tous prennent soin de rappeler que la décision revient à Emmanuel Macron et à lui seul. Mais aucun ne balaye ce bruit de couloir insistant, alors que l’échéance de fin des JO évoquée pour nommer le nouveau chef de gouvernement se rapproche. Mieux, tous y vont de leur petit compliment à l’égard du président LR de la région Hauts-de-France.

« Homme politique avec une très grande compétence », « peut servir grandement la France », pour son ancien collègue de LR Gérald Darmanin, le 29 juillet sur France 2. « Grand républicain parmi Les Républicains », abonde Sabrina Agresti-Roubache le lendemain sur CNews/Europe1. « Il a beaucoup de qualités Xavier Bertrand », estime à son tour Bruno Le Maire sur France 2 ce 31 juillet. Mais pour le locataire de Bercy, « la première qualité du Premier ministre devra être de constituer une coalition, de rassembler, de dialoguer. »

Bertrand, un profil presque parfait ?

Xavier Bertrand peut-il satisfaire à ce critère ? Il partage en tout cas la vision et défend une « démocratie parlementaire ». En cas de défaite du RN, « est-ce que les groupes parlementaires vont faire preuve de la responsabilité nécessaire pour dire (..) qu’on peut trouver une solution ? Que chacun, sans se renier, est capable de dire ’là-dessus, on est capable de se mettre d’accord’ ? », interrogeait-il sur franceinfo le 5 juillet, en plein entre-deux-tours.

Presque un mois plus tard, son discours trouve un écho dans celui du président de la République, qui a estimé, le 23 juillet, que « la question n’est pas un nom » mais « quelle majorité peut se dégager à l’Assemblée pour qu’un gouvernement puisse passer des réformes, passer un budget et faire avancer le pays ». Depuis, Emmanuel Macron a listé quelques-unes de ses attentes vis-à-vis de son futur chef de gouvernement : justice, sécurité, immigration, services publics, pouvoir d’achat et une personne capable de faire souffler « un parfum de cohabitation » selon l’Élysée cité par Le Monde.

Un point en plus pour le LR Xavier Bertrand, qui n’a pourtant pas retenu ses coups contre le chef de l’État ces dernières années ? Le 9 juillet dans L’Évènement, il plaidait pour un « gouvernement d’urgence nationale » dirigé par une personnalité LR et qui rassemble son camp, indépendants, macronistes, « les hommes et les femmes de bonne volonté. » Sa première proposition : « plus de sécurité et moins d’immigration. » Là encore, raccord avec les pistes d’Emmanuel Macron.

Xavier Bertrand a toujours esquivé quand on l’interroge sur son envie de Matignon. Mais il « se prépare, consulte, passe des coups de téléphone, en reçoit beaucoup aussi » reconnaît ce 30 juillet son entourage dans L’Opinion.

À l’Assemblée, les calculs sont-ils bons ?

Reste que tous les critères ne sont pas remplis. « Le président a deux critères, il veut une majorité large et stable », dit-on à l’Élysée, selon nos confrères du Monde. L’argument est avancé pour évacuer la candidature de Lucie Castets. Mais il ne joue pas non plus en faveur de Xavier Bertrand. Car s’il peut compter sur l’appui de certains macronistes, sa famille politique n’est pas unie derrière lui.

À commencer par le nouveau président du groupe à l’Assemblée, Laurent Wauquiez : les deux ont des vues sur l’Élysée en 2027 et sont rarement raccord sur la ligne de leur parti. Ils entretiennent donc des relations (très) fraîches. Le soutien inconditionnel des 47 députés n’est pas donc acquis – même s’il est aussi difficile d’imaginer les élus LR voter une motion de censure contre un Premier ministre issu de leurs rangs…

Ensuite, le Nouveau Front Populaire. Depuis 2021, Xavier Bertrand doit travailler avec l’opposition de gauche au Conseil régional des Hauts-de-France. Parmi eux, Marine Tondelier et l’ancienne eurodéputée écologiste Karima Delli qui préside le groupe. La première reconnaît le 5 juillet sur franceinfo qu’il est possible de « travailler ensemble de manière républicaine » avec l’élu de droite malgré des désaccords profonds. Parmi lesquels le nucléaire, la chasse, les éoliennes… « Le programme qu’il porte est climatosceptique, comme celui du RN », étrille d’ailleurs Karima Delli, jointe par Le HuffPost.

Les deux écologistes admettent des ententes trouvées sur certains dossiers. « Mais dans la philosophie politique, nous ne sommes pas d’accord », insiste la présidente du groupe d’opposition. Exemple sur le pouvoir d’achat, que Xavier Bertrand présente comme un terrain transpartisan. « Et pourtant, il est contre la gratuité des TER pour les moins de 26 ans », réplique son opposante.

Un soutien – même sous forme d’abstention sur une motion de censure – des députés NFP à Xavier Bertrand à Matignon est exclu. D’une part parce qu’ils ont leur candidate, Lucie Castets. Ensuite parce qu’au vu des résultats des législatives, « ce serait un hold-up démocratique » résume Karima Delli. Enfin, parce que Xavier Bertrand, comme Emmanuel Macron, défend un « ni-RN ni-LFI » inaudible pour l’alliance des gauches. « Ce que je propose dans ce gouvernement d’urgence nationale (..) c’est une forme de majorité, qui n’est pas la majorité absolue j’en ai conscience, mais qui s’en rapproche le plus et qui est capable de gouverner maintenant », défendait Xavier Bertrand le 9 juillet. Emmanuel Macron fera-t-il les mêmes calculs ?

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