Sur Bétharram, Bayrou a musclé sa défense mais sans faire oublier ses contradictions
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POLITIQUE – L’attaque est-elle vraiment la meilleure défense ? Le ton était ferme, les répliques vives, mais les plus de cinq heures d’audition de François Bayrou laissent une impression mitigée. Ce mercredi 14 mai, le rendez-vous était crucial pour le Premier ministre entendu par la commission parlementaire qui se penche notamment sur les violences à Bétharram. Le Béarnais est soupçonné d’avoir su mais de s’être tu.
Cette fois pas question de se laisser prendre de court. François Bayrou dont la défense s’est jusqu’ici révélée tour à tour hésitante, floue, voire contradictoire a résolument bûché. Ce sont les bras chargés de documents qu’il est arrivé promettant de présenter des « preuves ». Malgré quelques longueurs avec des références historico-littéraire, et des saillies contre ce qu’il décrit comme une cabale à son encontre, impossible pour le Premier ministre de livrer ses digressions habituelles.
Sur le fond de l’affaire, le locataire de Matignon a martelé qu’il n’avait eu connaissance des faits « graves » que grâce aux articles de journaux locaux, – et non Mediapart qu’il a vilipendé – et que « jamais » il n’avait varié dans sa version. Et le Premier ministre d’étaler à chaque fois sa chronologie sur les parties les plus difficiles de l’affaire tentaculaire pour finalement conclure : « Je n’ai pas ma part de responsabilité dans ce dont on m’accusait. Je n’ai pas couvert des pratiques quelles qu’elles soient (…) Mais pour le reste, on a tous une part de responsabilité, tous » dans les violences contre les enfants.
Françoise Gullung « dérangée », un gendarme affabulateur
Le ton est monté dans les premières heures concernant le travail de la commission et de certaines auditions passées. Il a d’abord défendu la version du juge Mirande – qui n’a « jamais trahi le secret de l’instruction » – sur leur rencontre dont il dit ne pas se souvenir. Ce qui ne l’empêche pas d’assurer : « il ne m’a rien appris sur cette affaire [de Bétharram] parce que tout était dans le journal l’avant-veille ». L’enseignante Françoise Gullung, qualifiée de lanceuse d’alerte par les députés corapporteurs de la commission, a, elle, été accusée d’avoir affabulé devant la commission. Accusée comme d’autres témoins d’avoir une mémoire défaillante, selon François Bayrou, elle ne pouvait pas d’ailleurs connaître le père Carricart (directeur de l’institution) en raison des dates de son passage à Bétharram. « Cette dame a été réputée par la médecine scolaire “dérangée” », a-t-il cinglé.
La professeur qui assurait avoir alerté par courrier et de vive voix le Premier ministre sur les violences au sein de Bétharram a répliqué dans la foulée : « amateurisme » et « déni ».
Autre auditionné par la commission, le gendarme Alain Hontangs a aussi été chargé par le Premier ministre d’avoir « affabulé » ou « menti ». Ce dernier avait assuré que dans l’affaire Carricart, le procureur général était intervenu sur demande de François Bayrou. « Je ne suis jamais intervenu dans aucune affaire [judiciaire ]», a asséné le Premier ministre, malgré un récent article du Monde tendant à mettre en doute cette assertion.
Derrière le ton vindicatif et la pugnacité de François Bayrou à écarter sa responsabilité politique, avec force de détails, le terrain s’est aussi régulièrement dérobé sous ses pieds.
Paul Vannier visé, un rapport un peu trop vite oublié
Surtout, François Bayrou a donné l’impression d’instrumentaliser, lui-même, politiquement sa propre audition à force d’asséner le même grief sur « sa méthode » au député insoumis Paul Vannier, corapporteur. Étrillant la commission pour ne pas avoir été « objective », il a considéré que son audition avait eu pour but de le « coincer » pour l’« obliger à démissionner ».
Ce sont cependant des questions cliniques de Violette Spillebout qui l’ont fait vaciller. François Bayrou a défendu avoir demandé un rapport dès 1996, après une plainte pour gifle, mais sans donner l’impression de prendre en compte la totalité de l’étude, effectuée par ailleurs de manière express et jugée peu contraignante. Des « règles d’inspection exceptionnelles pour l’époque » a remarqué l’élue Renaissance.
Interrogé sur des passages qui mentionnent des méthodes « dures », le Premier ministre en avait visiblement surtout retenu ses conclusions positives de quelques lignes. A-t-il fait un signalement à la justice ? Aurait-il une lecture différente aujourd’hui ? Le Premier ministre a éludé tout en admettant du bout des lèvres : « c’était il y a trente ans, aujourd’hui sûrement, il y aurait de grands changements (…) Est-ce que j’aurais dû, pu, en faire plus, c’est possible. Sans doute ». Voilà pour la contrition.
Il y a « gifle » et « tape »
Révélation de la commission : un compte rendu de conseil à Bétharram assure que François Bayrou a pourtant demandé après ce rapport laudateur que l’établissement engage une réflexion sur les violences en son sein. « Ça veut dire que j’ai saisi qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas », a réagi le Premier ministre, une « contradiction importante » avec son attitude face au rapport a estimé Paul Vannier.
Dans la foulée de ce moment délicat, le député insoumis a interrogé François Bayrou sur sa conception de l’éducation, au regard notamment de la gifle qu’il a assénée à un enfant à Strasbourg en pleine campagne présidentielle de 2002. Revenant sur le contexte tendu de ce déplacement, le Premier ministre a soufflé le silence dans la salle en assurant qu’il y a « gifle » et « tape », donnant l’impression d’une forme d’échelle dans les gestes : « C’était un geste éducatif. Je le maintiens aujourd’hui, ce n’est pas conforme aux canons mais c’est la vérité de la vie ».
Une réflexion qui a alimenté des questions et risque de nourrir le caractère poisseux de cette affaire dans la carrière de François Bayrou. Une ministre le prophétisait mardi au HuffPost : « ça continuera de lui coller à la peau ».
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