Politique

Trump, Israël, Palestine… Macron à la peine à l’international ?

DIPLOMATIE – Le principe de réalité s’est rappelé au sans doute mitigé souvenir du président de la République. Condamné depuis la dissolution à être un commentateur plutôt qu’un acteur des joutes politiques franco-françaises, Emmanuel Macron a pleinement investi ses prérogatives à l’international. Au premier plan pour réarmer l’Europe cet hiver face à la crise de confiance avec les États-Unis, la poudrière moyen-orientale des dernières semaines ne lui offre que peu de prises.

Après le Groenland et le G7, le président français devait se retrouver au cœur d’une conférence à l’Onu, avec l’Arabie saoudite, pour poser les bases d’une reconnaissance de la Palestine. Mais la promesse a fait long feu. Début avril, Emmanuel Macron assure que la France pourrait reconnaître l’État dès juin, avec d’autres pays. Une déclaration importante mais qui va finalement s’effilocher faute de soutiens internationaux.

Lors de sa tournée en Asie du Sud-Est, le président a échoué à arracher à l’Indonésie, le plus grand pays musulman, une normalisation de ses relations avec Israël. Ensuite il n’a plus été question que de « paver » la route « vers » une reconnaissance. Un balisage répété à l’envi par le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, et qui a fait perdre de sa densité à la presque promesse de reconnaissance.

La question ukrainienne éclipsée

Le coup de grâce est arrivé avec les frappes sans précédents d’Israël sur l’Iran le 13 juin, rendant caduque la grande conférence à New York, annulée. « Dès les prochains jours, en lien évidemment avec les dirigeants de la région et plus particulièrement avec l’Arabie saoudite, une date sera refixée », a-t-il assuré.

C’est aussi le G7 qui s’est ouvert au Canada à Kananaskis qui s’en est dans la foulée retrouvé chamboulé. Alors qu’Emmanuel Macron entendait arracher à Donald Trump plus de sanctions contre la Russie, la question ukrainienne a tout simplement été éclipsée. Et la réunion bilatérale prévue entre l’Américain et Volodymyr Zelensky a été annulée. Pis, dès lundi, Trump s’est dit sceptique sur de nouvelles sanctions, qualifiant d’« erreur » la décision d’expulser la Russie de ce qui était alors le G8, après l’annexion de la Crimée par Moscou en 2014.

Macron pris entre Trump et Israël

Or, si la question de la sécurité du continent européen est un marqueur fort de la diplomatie macronienne, la singularité française apparaît plus faible au Moyen-Orient. Est-ce pour cela qu’Emmanuel Macron a proposé dès vendredi l’aide de la France à Israël pour des opérations défensives ? Un rapprochement immédiat avec les positions américaines, qui aurait pu adoucir les relations tendues avec Netanyahu, mais dont le président n’a pas pu vraiment récolter les lauriers.

Alors que les tirs se poursuivent entre Israël et l’Iran, le gouvernement a ordonné de masquer lundi des stands d’entreprises militaires israéliennes du salon de l’armement du Bourget, accusés d’exposer des armes offensives. Cela aurait fait l’objet d’un accord avec Tel Aviv, en raison de la situation infernale à Gaza, mais Israël n’a pas manqué de fustiger l’ambivalence française.

Quant à la situation entre Israël et l’Iran, les autres membres du G7, qui ont tous signé un appel à la désescalade, restaient dans une posture attentiste face aux signaux américains confus. Interlocuteur privilégié de Netanyahu, Donald Trump a quitté brusquement le sommet dans la nuit de lundi à mardi, sans véritable explication. Pour un cessez-le-feu, pour négocier avec Téhéran, ou participer aux opérations militaires offensives israéliennes afin d’aller vers un changement de régime ?

Trump fustige Macron

En quittant le Canada, le locataire de la Maison Blanche s’en est pris au président français, lui reprochant « pour se faire de la publicité », d’avoir présenté de façon « erronée » que son départ visait à œuvrer à un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran. « Faux ! Il n’a aucune idée de la raison pour laquelle je suis maintenant en route pour Washington, mais cela n’a certainement rien à voir avec un cessez-le-feu. On cherche quelque chose de mieux », a lâché Donald Trump sur son réseau Truth Social, avant d’ajouter : « Emmanuel, c’est un chic type, mais il n’a pas raison très souvent ».

Le signe que Paris et Bruxelles n’ont guère l’oreille de Washington, et que le réchauffement des relations avec Donald Trump n’est pas pour tout de suite. Le président français a d’ailleurs lui-même reconnu que seuls les Américains disposent d’une réelle influence sur les opérations israéliennes, ajoutant dans un pas de côté que « les Français et à leurs côtés les Britanniques et les Allemands sont [eux] disponibles pour reprendre des discussions » sur le nucléaire iranien. Le locataire de l’Élysée a néanmoins fustigé l’escalade : « Tous ceux qui croient qu’en frappant avec des bombes depuis l’extérieur on sauve un pays malgré lui-même et contre lui-même se sont toujours trompés ».

Le président doit se rendre vendredi au salon du Bourget. L’occasion de récupérer un peu d’éclat et de faire un peu de pédagogie à l’attention, au hasard d’Israël ? Le chef de l’État ne peut guère compter sur les troupes du bloc central pour porter le position diplomatique de l’Elysée en dehors des séances de QAG. Quant à la question de la reconnaissance de la Palestine, reportée sine die, elle mobilise surtout… à gauche.