Politique

Une étude plonge dans la tête des électeurs de gauche… et les résultats ne sont pas brillants

POLITIQUE – Un champ de ruines. Voilà comment les électeurs de gauche, qu’ils soient plutôt proches du Parti socialiste, des Écologistes ou de La France insoumise, voient leur camp politique. Minée par les divisions, affaiblie par les querelles d’ego, la gauche exaspère ses sympathisants et/ou militants, d’après les résultats d’une vaste enquête menée conjointement par la fondation Jean-Jaurès, l’institut Ipsos et le Nouvel Obs.

L’idée de départ était de comprendre ce qu’il se passe « dans la tête d’un électeur de gauche ». Deux groupes ont alors été formés : l’un composé d’électeurs insoumis et écologistes, l’autre principalement de socialistes. À chacun, des questions ont été posées sur les personnalités de gauche les plus marquantes du paysage politique actuel, ainsi que sur les prochaines échéances électorales. En ressort un état de démoralisation et de pessimisme anormalement élevé dans un camp politique plus habitué à l’idée que demain sera meilleur.

« Jamais la gauche ne m’est apparue aussi plombée, confirme Brice Teinturier, directeur délégué de l’Ipsos auprès de l’hebdomadaire. Même en 1993, quand elle était au plus bas électoralement, usée par l’exercice du pouvoir et minée par le mitterrandisme déliquescent, les électeurs conservaient des espérances ». Un an après la victoire relative du Nouveau Front populaire aux législatives anticipées, qui ne s’est jamais traduite dans les faits puisque la gauche n’a pas été appelée à gouverner, et à deux ans d’une élection présidentielle qui risque de rebattre toutes les cartes, les électeurs ont toutefois une idée bien précise de ce qu’ils attendent de leurs représentants.

Pour les sympathisants LFI, la priorité doit être donnée à la lutte contre le « retour des privilèges » et contre « l’extrême droite ». Pour ceux plus proches du PS, c’est la « désindustrialisation » qui devrait davantage préoccuper le gouvernement. Ce qui frappe à la lecture de l’étude, c’est surtout de voir ce qui rapproche ces électeurs sur le fond. Ils partagent un socle de valeurs bien plus important que ce que ne laissent transparaître les chefs de parti sur les plateaux de télévision ou sur les réseaux. « L’humanisme », « le progrès », « le partage des richesses », « l’écologie » ou encore « la défense des minorités » sont ainsi largement communs à tous les électeurs de gauche.

« Un paresseux » ou « une marmotte »

Ce qui les éloigne, c’est la perception de leurs camarades. Pour les socialistes, le programme économique de La France insoumise est « irréaliste » et prône « un mauvais égalitarisme ». Pour les insoumis, le PS est « libéral », voire même est composé de « centristes de droite ». Dans l’histoire récente, les premiers restent très marqués par l’échec de Lionel Jospin à se qualifier au second tour de l’élection présidentielle de 2002, tandis que les seconds font davantage référence au référendum sur la Constitution européenne de 2005.

Le Nouvel Obs a aussi demandé à ces électeurs de comparer leur famille politique à un objet, à un animal, voire à un film. Ainsi se dessine le portrait d’une gauche comparée à « un paresseux », « une marmotte », « une écrevisse qui marche à reculons ». Elle serait aussi « un iPhone de 2008 qu’on a du mal à lancer » ou « un pouf » sur lequel on se serait avachi un peu trop longtemps. La France insoumise ? « Un guépard », « un chacal », « une hyène ». Le Parti socialiste ? « Un ours qui hiberne », selon ses propres électeurs, « un pot de fleurs » ou « un miroir dans lequel on se regarde trop ». Des enseignements pas inutiles à tirer, alors que le PS se réunit tout le week-end à Nancy pour son 81e congrès.