Politique

Une liste « d’avocats à éliminer » en « cas de victoire RN » provoque l’indignation

POLITIQUE – Tout est-il permis en période électorale ? À trois jours du second tour des élections législatives, un site d’extrême droite a publié une liste d’une centaine de noms d’avocats qu’il faudrait « éliminer » selon les résultats du 7 juillet. Il est reproché à ces « pourritures » et à ces « vermines en robe noire » d’avoir signé une tribune dans Marianne appelant à faire barrage au Rassemblement national, au nom de la fidélité aux « principes du droit, des libertés fondamentales et des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité ».

Une prise de position qui fait bondir les auteurs du texte. « À envoyer dans un fossé ou dans un stade, ces avocats déclarent déjà ne pas respecter le verdict des urnes en cas de victoire du RN », peut-on lire sur ce site baptisé « Réseau libre », qui illustre sa liste avec une photo de guillotine. Le ton employé, ainsi que les mots choisis, sont d’une extrême violence.

L’indignation a été immédiate. L’Association des avocats pénalistes a rapidement réagi, estimant qu’il s’agit « de la première fois qu’il est explicitement appelé en France au meurtre d’avocats ». « Nous dénonçons ces dérives depuis plusieurs mois, nous nous joindrons au signalement effectué au Parquet de Paris et assurons aux confrères concernés notre inconditionnel soutien », écrivent-ils.

« La démocratie est menacée »

Le Syndicat des avocats de France lui a emboîté le pas en prévenant qu’il n’hésitera pas à aller en justice : « L’extrême droite aux portes du pouvoir, ce sont des listes d’avocats à éliminer qui sont publiées. Un rappel qu’il est plus que jamais nécessaire d’y faire barrage. Le SAF apporte tout son soutien aux consœurs et confrères visés et engagera les procédures qui s’imposent ».

À circonstances exceptionnelles, réaction exceptionnelle. Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a également pris la plume pour « condamner avec la plus grande fermeté la publication par un site d’extrême droite d’une liste d’avocats à éliminer ». Selon cet avocat de profession, « ceux qui veulent la mort de nos libertés commencent toujours par s’en prendre aux avocats. Je ne les laisserai jamais faire. » Idem pour le bâtonnier de Paris, Pierre Hoffman, qui se fait le garde-fou des principes démocratiques : « La démocratie est plus que jamais menacée lorsque circulent des listes d’avocats à éliminer parce qu’ils remplissent leur mission. Nous ne tolérerons jamais ces menaces et y donnerons toutes les suites qui s’imposent. Soutien à nos consœurs et confrères menacés. »

En 2001, un autre site d’extrême droite, SOS racaille, avait usé des mêmes méthodes, en publiant lui aussi une liste d’avocats accusés de « défendre la racaille anti-France ». Les bâtonniers de dix-huit des plus importants barreaux d’avocats de France avaient alors décidé de faire front en dénonçant de manière conjointe les propos injurieux du site.

Le média en ligne Street Press avait enquêté il y a quelques semaines sur Réseau libre. Il en ressort que ce site d’extrême droite, mis en ligne en 2015, s’est construit sur le rejet « des immigrationnistes, des pédérastes, des politicards, des immigrés, des bobos, des collabos, des juges rouges ». Son objectif affiché : « Dénoncer la vermine qui assassine la France ». Afin de prévenir tout risque de « censure de l’État collaborationniste français », « Réseau libre » avait fait le choix d’être hébergé en Russie. Tiens, tiens, cette même Russie qui, dans le cadre des législatives, soutient officiellement le RN, comme l’a exprimé le 3 juillet le ministère russe des Affaires étrangères.

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