Santé

Ce bébé sauvé d’une maladie mortelle par la thérapie génique est un immense pas en avant

SANTÉ – C’est comme si la ligne d’arrivée était (enfin) en vue pour la thérapie génique. Cette technique prometteuse, révolutionnaire même, fait parler depuis des années, mais ses applications ont longtemps semblé prendre du retard par rapport aux attentes. Mais une équipe de l’Université et de l’hôpital pour enfants de Pennsylvanie vient de montrer que la recherche sur ce front n’a cessé d’avancer, malgré les obstacles, en publiant ses résultats dans la revue The new england journal of medicine.

C’est le fils de Kyle et Nicole Muldoon, KJ, qui a permis cette avancée. Âgé de neuf mois, le bébé était atteint d’une forme sévère de déficit en CPS1, une enzyme essentielle au bon fonctionnement de notre corps. Sans elle, l’ammoniac que produit naturellement notre corps n’est pas transformé en urée, et s’accumule dans le sang. Une affection mortelle pour notre corps si elle n’est pas traitée.

Ce déficit, provoqué par une mutation génétique, ne pouvait jusqu’ici être traité que par une greffe d’un foie sain. Une procédure qui, en plus d’exiger une attention constante tout au long de la vie du patient, présente des dangers pour les patients d’un très jeune âge, comme c’est le cas pour KJ. À l’hôpital depuis sa naissance, le petit garçon a donc reçu avec succès en février la première dose d’une thérapie génique qui lui évite cette procédure, et ouvre la voie à d’autres traitements pour de nombreux malades.

Pour comprendre ce qu’a fait l’équipe américaine, il faut revenir sur ce que sont nos gènes. Tout être vivant est constitué d’ADN, lui-même composé de plusieurs « bases nucléotides », l’alphabet du vivant. Pour faire simple, 4 lettres servent à créer les brins d’ADN : A, T, C et G. Celles-ci fonctionnent par paires : A avec T et C avec G (rappelez-vous, il y a deux brins dans l’ADN). C’est l’ordre de ces séquences de lettres qui définit chaque gène.

Petit changement, énorme effet

Dans le cas de KJ, le déficit en CPS1 était provoqué par une paire, qu’a su transformer l’équipe en utilisant la technique Crispr-Cas9. Souvenez-vous, Crispr ce sont les fameux « ciseaux du vivant », une technique révolutionnaire mise au point en 2012 qui permet de modifier les lettres de notre ADN en visant des zones spécifiques de notre génome. En utilisant la technique existante et en l’accélérant avec un nouveau procédé, les médecins et chercheurs ont transformé une base A-T en base G-C. De quoi permettre à son corps d’éliminer l’ammoniac à nouveau.

KJ est en pleine forme, ses parents soulagés, et la médecine aussi. Pour la thérapie génique tout entière, cette expérience réussie a tout d’une étape. Bien sûr, la thérapie génique et Crispr ont déjà été utilisés par le passé, mais jamais pour cette maladie, et jamais dans le but de remplacer une base par une autre. Pour soigner la dystrophie musculaire par exemple, on avait déjà réussi à désactiver la partie visée du génome. Mais ce qui a été accompli ici pourrait servir à soigner de nombreuses autres maladies génétiques.

« Ce travail est la preuve du principe d’un protocole rapide et efficace pour les thérapies Crispr-Cas9 visant à guérir les maladies humaines en général et les maladies dites rares en particulier, ouvrant la porte à d’autres traitements similaires dans un avenir proche », a ainsi réagi Miguel Ángel Moreno-Mateos, docteur au Centre andalou pour la Biologie du développement. KJ, lui, va continuer à être suivi de près, mais il est la preuve vivante que la science avance.

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