INTERVIEW – Ce qu’est la 3-MMC, drogue qu’un député LFI est accusé d’avoir achetée
DROGUES – « Au-delà de ma personne, l’addiction est un problème de santé publique et doit être traitée comme tel. » Après avoir été contrôlé le 17 octobre « en possession de stupéfiants », le député LFI de Loire-Atlantique Andy Kerbrat a reconnu qu’il venait d’acheter 1,35 g de 3-MMC, une drogue de synthèse en plein essor en France, notamment dans les milieux festifs.
Le HuffPost fait le point sur cette substance et les risques que sa consommation comporte avec Amine Benyamina, chef du service de psychiatrie et d’addictologie de l’Hôpital Paul-Brousse (AP-HP), président de la Fédération française d’addictologie et auteur d’un rapport sur l’usage de drogue dans le cadre du « chemsex », remis au ministre de la Santé en 2022.
Le HuffPost. Qu’est-ce que la 3-MMC ?
Dr Amine Benyamina. La 3-MMC est une molécule synthétique dérivée des cathinones, des produits psychostimulants, qui appartient à ce que l’on appelle les « nouveaux produits de synthèse » (NPS).
C’est une substance psychoactive, un stimulateur du plaisir sexuel, très souvent utilisé pour améliorer, augmenter la performance et le désir pendant les rapports sexuels. C’est le produit le plus souvent consommé dans le cadre du « chemsex » [un terme issu de la fusion des mots anglophones « chemicals » (produits chimiques) et « sex », qui désigne la consommation de substances psychoactives en contexte de sexualité, ndlr]. D’autres drogues sont associées à cette pratique, comme la méthamphétamine, les cathinones en général, le GHB et la kétamine.
Sous quelle forme se présente la 3-MMC ?
La plupart du temps, les cathinones de synthèse se présentent sous forme de poudre cristalline et sont essentiellement consommées par voie orale (bombing ou parachute : ingestion de la poudre dans une feuille enroulée) ou par voie intranasale (sniff). Elles peuvent aussi être consommées par voie intrarectale (plug ou booty bump) ou intraveineuse (slam).
On entend souvent dire que cette drogue est la « nouvelle cocaïne ». Est-ce pertinent selon vous ?
Non, ce produit a un profil un peu différent de la cocaïne. Il n’a pas les mêmes propriétés pharmacologiques. La cocaïne est un psychostimulant pur. Là, la visée est sexuelle.
Depuis quand la 3-MMC est-elle utilisée en France ?
Ce produit est vraiment apparu en France à partir des années 2010, avec l’arrivée de nouveaux produits de synthèse. L’usage de substances psychoactives en contexte sexuel est un phénomène ancien et présent dans toutes les cultures, mais ce que l’on appelle « chemsex » est originellement issu de la communauté gay, dans le cadre de pratiques de sexualité en groupe. Depuis, il s’est popularisé dans les milieux festifs et il n’est plus utilisé exclusivement dans ce contexte.
Ce produit présente-t-il des risques d’addiction élevés ? Plus que d’autres drogues ?
Ce sont des produits dangereux et très addictifs, assez violents pour l’organisme. Les effets peuvent être liés à l’injection ou au partage des produits. Il existe également le risque d’être victime ou à l’origine de violences sexuelles, lié à la libération du désir sexuel. Et puis toutes les problématiques psychiatriques engendrées par la psychostimulation : le crash dépressif, des accès maniaques…
En raison du phénomène de tolérance [un processus d’accoutumance, ndlr], les usagers de cathinones de synthèse ont besoin de répéter les prises et d’augmenter les doses pour en reproduire les effets. Il existe également un phénomène de craving (envie irrésistible de consommer) et une perte de contrôle en fonction du contexte de consommation. Et les complications sont les mêmes que pour les autres drogues : neurologiques, psychiatriques, cardiaques, dentaires…
Cette drogue est-elle particulièrement accessible ?
Elle le devient de plus en plus. C’est le principe : plus c’est diffusé et plus le prix baisse. Ce sont des produits facilement disponibles, fabriqués dans des laboratoires à l’étranger. C’est un vrai problème de santé publique. Et depuis mon rapport en 2022, rien n’a été fait en matière d’épidémiologie, de prévention ou de prise en charge des personnes concernées.
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