Santé

Le sucre, « un poison », selon RFK Jr ? Pas si simple, selon ce diabétologue

SANTÉ – « Le sucre est un poison et les Américains doivent savoir qu’il nous empoisonne. » Ces propos, tenus par le ministre de la santé américain Robert F. Kennedy Jr lors d’une conférence de presse mardi 22 avril, sont sans appel. Alors que RFK Jr s’est engagé à établir une « transparence radicale » et à « rendre aux Américains leur santé », il s’est attaqué aux additifs alimentaires, mais également au sucre.

« Je ne pense pas que nous pourrons éliminer le sucre, mais je pense que ce que nous devons faire, probablement, c’est informer les Américains sur la quantité de sucre contenue dans les produits, et aussi, avec les nouvelles directives nutritionnelles, leur donner une idée très claire de la quantité de sucre qu’ils devraient utiliser, c’est-à-dire zéro », a-t-il annoncé.

Mais faut-il, comme il l’affirme, bannir tout type de sucre de notre alimentation ? On fait le point avec le Pr Jean-Pierre Riveline, diabétologue à l’Hôpital Lariboisière à Paris et responsable du Centre Universitaire de Diabétologie et de ses Complications (CUDC).

Le HuffPost. Faut-il être obsédé par son taux de sucre et éviter les pics de glycémie à tout prix ?

Pr Jean-Pierre Riveline. Chez les personnes vivant avec un diabète, il est avéré qu’une variabilité glycémique importante n’est pas anodine pour la santé. Dans ces cas-là, toute démarche thérapeutique qui limite cette variabilité, qui peut passer par des règles hygiéno-diététiques, comme l’alimentation, ou par la prise en charge par des médicaments ou de l’insuline, est bénéfique pour le patient.

En revanche, chez les personnes qui sont en bonne santé, nous n’avons pas la preuve que la variabilité glycémique a des conséquences sur la santé, même si ce n’est pas exclu. Il faut se méfier de l’intérêt financier qu’il y a derrière des conseils ou des pratiques qui ne sont pas toujours démontrées scientifiquement.

Nous n’avons pas de données d’études rationnelles qui étayent cette hypothèse sur les pics de glycémie chez des personnes en bonne santé. Et cela peut créer une certaine anxiété, une certaine peur dans la population. Est-elle justifiée ? Je n’en suis pas certain.

Sait-on ce qu’un pic de glycémie provoque dans l’organisme ?

Chez les patients qui ont une pathologie, il a été démontré que les pics de glycémie aigus créaient un phénomène chimique dans le corps qui s’appelle le « stress oxydant ». C’est comme si on enflammait une allumette dans une cellule. Ce « stress oxydant » n’est pas anodin, et participe probablement à l’apparition de complications du diabète, notamment cardio-vasculaires.

Chez les personnes en bonne santé, il n’y a pas de démonstration qu’un pic de glycémie entraîne un tel phénomène. En revanche, je suis convaincu que limiter la consommation de sucres d’absorption rapide, souvent associés à des pics d’hyperglycémie, peut être à long terme louable – mais on n’a pas besoin de capteurs de glucose pour cela. C’est un bon moyen de prévenir la survenue d’un surpoids, d’une obésité ou d’un diabète de type 2 ultérieurs. Cela n’empêche pas de faire la fête de temps en temps, mais pas au quotidien.

Le sucre est-il nécessaire à l’organisme ?

Le sucre est indispensable à l’organisme, c’est un élément essentiel à la survie. Pour être en bonne santé, on sait comment il faut répartir les calories entre les glucides, les lipides et les protides. Ce qui est recommandé, c’est que plus de la moitié de la répartition des calories soit constituée par les glucides. Le sucre est l’une des principales sources d’énergie du corps.

Après, il y a différents types de sucres : les sucres d’absorption rapides ou simples, c’est tout ce que vous voyez dans une pâtisserie par exemple. Et les sucres d’absorption plus lente, plus complexes, que l’on trouve dans les pâtes ou les pommes de terre. Il vaut mieux privilégier les sucres d’absorption lente et en quantité raisonnable. Les fruits sont louables, ce sont des fibres qui ont des effets positifs sur le poids, le diabète et sur la prévention des cancers, surtout quand on les prend au milieu des repas.

Quand le ministre de la santé américain, RFK Jr, affirme que « le sucre est un poison », qu’en pensez-vous ?

Dire « le sucre est un poison », c’est vrai s’il n’est constitué par exemple que de Coca-Cola chez l’adolescent. Car ce ne sont que des sucres d’absorption rapide. Il y a aussi des recommandations sur la répartition des calories dans la journée : si vous mangez toute la journée des sucres rapides en dehors des repas, là c’est vrai que le sucre peut être néfaste.

Mais attention, ces discours peuvent être simplificateurs. Cela dépend de quel sucre et comment. Et surtout, c’est un discours contre-productif qui peut engendrer des troubles du comportement alimentaire : dire à quelqu’un « Tu ne mangeras jamais de gâteau d’anniversaire », c’est non…

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