Santé

Non, fumer ne détend pas, et c’est même tout le contraire selon cet addictologue

SANTÉ – Après une dispute, avant un examen ou un entretien d’embauche… Lorsqu’une personne fumeuse est stressée, elle peut avoir envie de sortir prendre l’air et de s’allumer une cigarette, à laquelle l’on prête parfois des vertus anxiolytiques ou de détente. C’est « une idée reçue », prévient l’addictologue et tabacologue Hervé Martini, également secrétaire général de l’association Addiction France, à qui Le HuffPost a posé la question.

Pourtant, certaines personnes ont bien l’impression que fumer réduit leur stress. C’est par exemple le cas d’Héloïse, une Bruxelloise de 26 ans, qui confie au HuffPost fumer régulièrement pour cette raison. « Quand j’ai un gros souci au travail, mon réflexe est d’aller fumer une clope pour me détendre et de résoudre la situation après. Sinon, je suis trop stressé et je n’arrive pas à passer au-dessus », détaille-t-elle.

Deux raisons expliquent ce prétendu effet antistress. Et ce ne sont en aucun cas des vertus liées aux produits contenus dans une cigarette.

Combler le manque

Pour bien comprendre pourquoi la cigarette ne détend pas réellement, il faut d’abord revenir sur le fonctionnement de l’addiction au tabac. Il existe trois volets à cette dépendance : celle dite pharmacologique, c’est-à-dire le manque physique de nicotine dans l’organisme ; la dépendance comportementale, qui regroupe toutes les habitudes prises par le fumeur qui associe certains moments à la cigarette ; et enfin la dépendance psychologique à la cigarette – autrement dit, les bénéfices que l’on associe psychologiquement au tabac.

La dépendance pharmacologique joue un rôle dans cette impression de détente. Lorsque le fumeur ressent le manque et s’allume une cigarette, il aura « une sensation de tension qui va s’apaiser temporairement », car il a eu la nicotine dont il avait besoin, selon Hervé Martini. Certains fumeurs vont ainsi penser que la cigarette détend. En réalité, elle calme seulement leur syndrome de manque.

Une idée construite

La deuxième raison, il faut aller la chercher du côté de la dépendance psychologique. « Après un conflit, une discussion âpre ou à la fin n’importe quel moment stressant, le fumeur va prendre une cigarette et se sentir détendu, détaille le tabacologue. Ce qui va détendre, c’est le fait de sortir de la pièce et de la situation anxiogène, ou de discuter avec une autre personne. »

Problème : le cerveau fait alors l’association entre la détente et la cigarette. Une dépendance psychologique va donc s’installer, et le fumeur va se construire l’idée que la cigarette a des vertus anxiolytiques.

Héloïse est bien consciente que le fait de fumer ne la calme pas réellement. « Je ne sais pas si c’est vraiment la cigarette qui me détend. Je dirais plutôt que c’est le fait de sortir prendre l’air et de penser à autre chose le temps de cinq minutes », concède la jeune femme.

Autre argument avancé par certains fumeurs : ils seraient détendus par le fait de souffler lorsqu’ils expirent la fumée de la cigarette. Cette fois-ci, c’est bien véridique. Mais la personne aurait plutôt intérêt à faire « un exercice respiratoire à la place », indique Hervé Martini.

Un frein à l’arrêt de la cigarette

La cigarette en elle-même n’a donc aucune vertu déstressante. Et c’est même le contraire, selon le tabacologue : « La nicotine est un excitant, un produit stimulant qui va générer une augmentation de la fréquence cardiaque. Le tabac est générateur de stress et d’anxiété. »

Penser que la cigarette est vecteur de détente peut être un frein à l’arrêt du tabac. « Le fumeur doit essayer de déconstruire cette idée », explique Hervé Martini, qui précise le rôle du tabacologue : « On le fait travailler sur des choses comportementales pour ne pas prendre une cigarette lorsqu’il est stressé. On essaye de repérer les situations de stress, et on envisage d’autres solutions, comme des exercices respiratoires, de méditation ou de relaxation. On, cherche à détourner le cerveau de la prise de la cigarette. » Mais l’arrêt définitif passe avant tout par « une prise de conscience » de la part du fumeur.

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