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En quoi le bilan de la France aux Jeux est historique (mais pas extraordinaire)

JO DE PARIS – Les Jeux olympiques de Paris sont déjà du passé. Et à l’heure du bilan, difficile de parler d’autre chose que d’une réussite : une cérémonie d’ouverture encensée qui fera date, une ambiance survoltée et bienveillante dans le public, des sites d’épreuves majestueux avec les monuments parisiens en toile de fond, des visiteurs étrangers charmés par ces Français qui ne se plaignent plus.

Et pour couronner le tout, plus d’une soixantaine de médailles françaises en 17 jours, du jamais vu depuis plus d’un siècle. Mais voilà, c’est justement de ce dernier point dont il va être question ici, avec cette interrogation qui paraît rabat-joie dans cet océan de bonheur populaire : bien que deux fois plus important qu’à Tokyo en termes de médailles, le bilan tricolore est-il si exceptionnel que cela ?

Pour tenter de répondre à cette épineuse question, recentrons-nous sur les chiffres, rien que les chiffres. L’équipe de France termine sa quinzaine olympique avec 64 médailles, dont 16 en or.

Certes, c’est presque le double de Tokyo (33 médailles) mais c’est presque une vingtaine de moins que ce qu’espérait la ministre des Sports Laura Flessel en 2017, au moment de l’attribution des Jeux à Paris, ou Jean-Michel Blanquer, au même poste, lors d’une conférence de presse en 2021.

Si Emmanuel Macron n’a lui jamais évoqué devant la presse cette barre de 80 médailles à atteindre, le président avait publiquement fixé en amont un autre objectif : terminer dans le top 5 au classement des médailles. Mission accomplie pour la délégation française, qui est même la première nation européenne, devant les Pays-Bas et la Grande-Bretagne.

Un record de médailles d’or, mais…

Mais c’est un autre chiffre qui interpelle, le ratio de médailles d’or. Dans sa prévision d’avant JO, l’institut Nielsen qui fait référence avait ainsi évoqué 60 médailles (barre franchie) mais 27 titres. Si le record de titres olympiques a été dépassé cette année (16), ceux-ci représentent moins du quart du total de médailles décrochées. Soit l’un des moins bons ratios dans le top 25 du classement des nations. Lors du précédent record à Atlanta en 1996 (15), le ratio était de 40 %.

« On a identifié 14 médailles d’or qui étaient accessibles et qu’on n’a pas obtenues », a d’ailleurs confirmé Claude Onesta, le manager de la haute performance à l’Agence nationale du sport (ANS). Malheureusement, les Bleus y sont allés un peu trop fort sur l’argent : 25 médailles, pour une part de près de 40 % de la moisson totale. Surtout, ils ont perdu 15 de leurs 21 finales disputées, note L’Équipe. Le pire ratio de ces 30 dernières années pour la France aux JO d’été.

Quand on voit que deux ou trois titres supplémentaires auraient suffi pour atteindre une belle troisième place au tableau des médailles, derrière des Chinois et Américains intouchables, la frustration peut exister. Parmi les médailles d’or espérées qui se sont transformées en argent, on peut citer celles de Luka Mkheidze en judo, de Lauriane Nolot en kitesurf ou de Sofiane Oumiha en boxe. « Il y a parfois la charge émotionnelle trop importante à domicile. Quand tu es en finale et que tu n’as pas déjà vécu ça, tu te retrouves dans des situations difficiles », tente d’expliquer dans L’Équipe Claude Onesta.

Pour ajouter à la déception, on peut aussi mettre en avant l’absence des athlètes russes – hormis une poignée sous bannière neutre – à Paris, qui avaient par exemple décroché 56 médailles à Rio et 71 à Tokyo. D’autant plus frustrant pour les Bleus puisque les Russes prennent d’ordinaire des médailles dans des sports où les Français ne sont pas très présents sur les podiums, sauf en escrime.

Des médailles dans 20 fédérations

Il faut aussi rappeler que la délégation tricolore se présentait sur la ligne de départ avec 571 athlètes dans ses rangs, soit la plus grosse de son histoire pour ces Jeux à domicile. À titre de comparaison, ils n’étaient que 378 à Tokyo et 399 à Rio.

Claude Onesta veut lui croire à des JO réussis malgré tout. « Avec 60 médailles, j’ai le sentiment du travail accompli », affirme-t-il dans L’Équipe. Il met notamment en avant les médailles obtenues dans une vingtaine de fédérations. « Les Britanniques sont médaillés dans 16 fédérations, le Japon et l’Australie dans 11 », rappelle-t-il. De quoi positionner la France troisième de ce classement officieux, toujours derrière la Chine et les États-Unis.

Ce qui n’empêche pas quelques zéros pointés : en aviron, en gymnastique, en escalade et en tennis par exemple. En athlétisme, le sport roi des Jeux, la France ne prend qu’une médaille – plutôt inattendue – et une seule aussi en cyclisme sur piste – certes en or -, dont on attendait un bilan plus élevé.

Finalement, la campagne tricolore a été dominée par l’ouragan Léon Marchand en première semaine, qui a tout emporté sur son passage avec ses cinq médailles, dont quatre en or. Il faut y ajouter le titre olympique du rugby à 7 qui avait lancé une belle dynamique, les deux médailles d’or de Teddy Riner, le triplé inédit aux JO d’été depuis un siècle (en BMX racing) ou le nombre important de médailles en judo, en natation et en escrime. La deuxième semaine, avec seulement une vingtaine de médailles obtenues, a clairement fait redescendre la température, qui est toutefois bien remontée ce week-end avec la fin des belles épopées en sports collectifs, dont la formidable médaille d’or des volleyeurs.

À la lecture de tous ces éléments, on pouvait donc espérer encore mieux des athlètes français, notamment sur le nombre de titres olympiques, avec des préparations spécifiques pour ce rendez-vous à domicile unique dans une vie. Ce qui est presque sûr désormais, c’est que ce total de 63 médailles devrait être très difficile à aller chercher pour les Bleus. Mais pourquoi pas franchir au moins régulièrement la marque des 45 ou 50 médailles tous les quatre ans. Un premier examen de passage est annoncé à Los Angeles, en 2028.

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