Le « Pass Rail » victime d’un sérieux coup de frein… qui ne satisfait personne
ENVIRONNEMENT – Un grand projet qui déraille ? L’instauration d’un « Pass Rail » était une volonté cardinale de l’ancien ministre des Transports Clément Beaune, qui avait reçu un fervent soutien d’Emmanuel Macron. Sauf que cette idée a été détricotée, jeudi 7 mars, par son successeur Patrice Vergriete. Les défenseurs de ce « ticket climat », notamment la gauche et écologistes, dénoncent un rétropédalage sur une mesure qui aurait été vertueuse.
Pour répondre aux problématiques d’inflation et de lutte contre le réchauffement climatique, Clément Beaune avait pourtant fièrement détaillé en septembre dernier les contours de son « Pass Rail », un billet de train servant à voyager sans limite et quel que soit son âge sur les trains Intercités et TER pour « autour de 49 euros ». Calqué sur le modèle allemand du « Deutschland-Ticket », le pass devait aussi fonctionner « avec les bus, métros et tramways dans nos grandes villes », dès l’été 2024, promettait le ministre.
Toujours une aberration pour ses détracteurs…
Mais Clément Beaune a dû plier bagage après le remaniement de février, quittant le ministère des Transports avec son idée de « Pass Rail » dans la valise. Et Patrice Vergriete, le nouveau ministre, a décidé d’y mettre un sérieux coup de frein. Jeudi, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée, l’ancien maire de Dunkerque a annoncé que le « Pass Rail » ne serait plus désormais qu’une « expérimentation cet été », destinée seulement aux jeunes jusqu’à 27 ans, « pour qu’ils découvrent nos belles régions ».
Comme vous pouvez l’entendre dans la séquence ci-dessous, relayée par Public Sénat, Patrice Vergriete a reçu au moment de cet exposé une remarque acerbe du sénateur centriste Franck Dhersin, ce dernier dénonçant le coût exorbitant d’un tel dispositif pour les régions. « Il faut cesser d’avoir de bonnes idées avec l’argent des autres », a-t-il cinglé.
Dès l’annonce du dispositif, la question du financement a fait débat. En effet, en Allemagne comme en France, les collectivités locales subventionnent largement les trains régionaux. Et avec un coût annuel de trois milliards d’euros chez nos voisins (50 % pour l’État et autant pour les régions), plusieurs régions ont d’ores et déjà fait connaître leurs réticences à financer cet outil.
Souhaitant rassurer les élus du centre et de la droite sur ce point, le ministre des Transports a promis du « pragmatisme », précisant qu’il formulerait une nouvelle proposition à présidente de l’association des régions de France, Carole Delga, notamment pour « se mettre d’accord sur une tarification ».
…et un renoncement pour ses défenseurs
Et s’ils n’ont pas été appréciés par les opposants à ce billet unique, les nouveaux contours du « Pass Rail » dessinés par Patrice Vergriete n’ont pas plus non plus à ses défenseurs. « Où est passée l’ambition initiale d’un Pass Rail pour tout le temps et pour tout le monde ? L’État ne veut finalement plus rien financer ? », a notamment fustigé sur X (ex-Twitter) Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France.
Comme vous pouvez le lire dans le tweet ci-dessous, pour le député insoumis de la Somme François Ruffin, c’est un mauvais recyclage d’une idée pas nouvelle. Emmanuel Macron a supprimé « le Pass Jeune TER à 29 € » en juin 2022, tacle-t-il, et maintenant le gouvernement veut « une expérimentation… cet été… pour les jeunes… à 49 € ».
L’eurodéputée écologiste Karima Delli, qui milite de longue date pour l’instauration d’un ticket climat à 49 € par mois pour des transports en commun illimités, a, elle, fustigé une idée « enterrée » par le gouvernement.
Dans une tribune au Monde publiée en mai, Karima Delli mettait en exergue la dimension sociétale que confère ce forfait : « Le train pour tous réduit la fracture territoriale qui mine notre pays entre, d’un côté, les Français de centre-ville et, de l’autre, les Français de zone rurale. »
Mais si le billet unique a été pensé comme un outil de justice sociale permettant à tous de voyager à bas prix, il s’avère que dans certaines régions moins bien dotées en transports en commun, il se révèle superflu. C’est pourquoi, si le « Pass Rail » doit voir le jour en France, il devra s’accompagner d’une amélioration de l’offre de trains et des infrastructures partout dans l’Hexagone. Avec encore une fois la même question : grâce à quelle bourse ?
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